Ce soir à 21 heures

Ce soir à 21 heures

Les gens avaient fait un cercle, ceux du premier rang raides, figés, contenaient avec peine ceux qui derrière eux jouaient des coudes pour voir, se mettant sur la pointe des pieds, s’appuyant les uns sur les autres pour garder leur équilibre. 

Tous étaient silencieux, le regard fixé sur le centre du cercle où couché sur le côté, l’ange blanc, ses longues ailes frémissant à la brise de la mer toute proche, semblait mort ou endormi.

Etait-il tombé ou s’était-il simplement posé là sur la dune dominant l’immense plage ? Il y eut un frémissement dans la foule ; il avait bougé, se redressait maintenant avec lenteur et chacun put l’admirer dans toute sa majesté.

Son visage était d’une immense tendresse, mais son regard était d’une grande tristesse. Ignorant l’assemblée muette de surprise et d’émotion, il déploya ses larges ailes et bientôt survola la foule en prenant de la hauteur, se dirigea vers la mer et dans une large courbe disparut.

Tout s’était passé très vite. Revenant petit à petit de leur stupeur, les gens se regardaient convaincus qu’ils venaient d’assister à quelque chose de miraculeux. Certains se signaient, le visage tourné vers le ciel, d’autres, plus téméraires s’agenouillaient à l’endroit où l’ange s’était envolé.

C’est alors que, venant de la grand-route qui longeait la plage, le son du haut-parleur d’un véhicule roulant à faible vitesse attira l’attention de tous. C’était encore inaudible, le vent n’apportait que quelques bribes de paroles indistinctes, mais lorsque le véhicule se rapprocha, chacun put entendre :

« Ce soir à 21 heures, place Victor Hugo, le cirque Max présente un numéro unique, Angelo l’homme volant, incroyable mais vrai, un numéro exceptionnel, du jamais vu… tous, ce soir à 21 heures pour une représentation unique. » 

Le jour déjà décroissait, alors déçue la foule se dispersa.

 

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